Maudits !
La malédiction dans les textes sacrés
Si le programme ReLRace s’intéresse plus particulièrement aux personnages maudits dont le lignage conserve l’anathème prononcé contre l’ancêtre fondateur, les malédictions bibliques ne se résument pas à ce seul emploi et, dans certains cas d’ailleurs – postérité de Guehazi, de Joab, de Joïakim –, la Torah évoque des punitions perpétuelles sans pour autant parler de malédiction. La Bible fait ainsi référence une centaine de fois à des malédictions usant pour ce faire de plusieurs termes formés notamment autour des racines אָרַר, la principale, קָלַל – plutôt centrée autour du domaine de l’insulte – אָלָה et קָבַב, rendus la plupart du temps en français par malédiction. Ces différents termes comportent cependant tous des nuances importantes d’emploi en fonction du contexte, allant de l’insulte à l’imprécation à portée éternelle. Les plus nombreuses occurrences, notamment dans le Deutéronome, consistent en des avertissements quant au comportement à adopter. Maudits sont ainsi ceux, par exemple, qui commettent l’adultère, pratiquent l’idolâtrie ou ne respectent pas leurs parents. Les ennemis des Hébreux puis du peuple d’Israël sont très souvent maudits mais Israël lui-même peut subir des imprécations quand il cesse de respecter les commandements. Les malédictions peuvent être prononcées par Dieu ou par des prophètes mais elles ne peuvent être lancées en vain contre la volonté divine, comme en témoigne l’histoire de Balak le Moabite dans le livre des Nombres. Ce dernier demande ainsi, sans succès, au prêtre Balaam de maudire les Hébreux sortis d’Égypte, parce que ces derniers sont déjà bénis de Dieu. La Bible est globalement percluse d’une dialectique béni/maudit avec des balancements incessants autour d’un équilibre difficile à tenir, comme en témoigne la situation ambivalente des royaumes d’Israël et de Juda au temps des prophètes. De même, bénédiction et malédiction ne peuvent être partagés par tous ainsi que l’indique la bénédiction que Jacob vole à son frère Esaü et qu’Isaac ne peut reproduire. Ainsi se pose à la fois la question de l’universalité et de la perpétuité des malédictions.