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Nouvelles preuves que les nègres descendent de Cham
Droits :
domaine public
Source
Gallica.bnf.fr
Relation
Bibliothèque nationale de France
Citer ce document
Théophile Foisset “Nouvelles preuves que les nègres descendent de Cham”, RelRace, item créé par Mathilde Plais, dernier accès le 21 Nov. 2024.
Contributeur
Mathilde Plais
Collection
Sujet
Les Africains, descendants de Cham
Description
Dans un article intitulé "Nouvelles preuves que les nègres descendent de Cham" paru en 1831, dans les Annales de philosophie chrétienne, Théophile Foisset, juge du tribunal de Beaune, entend prouver sur la base d’arguments rationnels (analyses des langues, caractéristiques physiques, mœurs…) que les noirs sont les descendants de Cham.
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Nouvelles preuves que les nègres descendent de Cham
Votre numéro de novembre (ci-dessus, p.311), emprunte à M.Virey de nouveaux développements, à l’appui de l’opinion qui reconnaît dans les Nègres les héritiers de la malédiction de Chanaan. Cette idée, soutenue à la fin du dernier siècle par Bernardin de Saint-Pierre, n’a rien d’hostile, certes, à la race qui en est l’objet : la prédication de la Bonne-Nouvelle a mis fin à tous les anathèmes de la loi de crainte et de servitude ; Jésus-Christ est mort pur tous les hommes, et c’est à tous qu’il a été dit par la bouche de l’Apotre : Vos in libertetem vocati estis, fratres. L’esclavage des nègres est un anachronisme au milieu de nous, c’est en effet qui survit à sa cause, et qui cessera, comme l’incrédulité juive, au jour prédit où il n’y aura qu’un bercail et qu’un pasteur. Tel qu’il se perpétue sous nos yeux, ce fait si étrange n’en est pas moins un vivant témoignage des paroles de la Genèse. Car ce n’est point seulement aux fils de Sem que la malédiction patriarchale avait asservi Chanaan et ses fils. « Aït noe : Maledictus Chanaan ! Servus servorum erit fratribus suis… Benedictus Dominus Deus Sem, sit chanaan servus ejus ! Dilatet Deux Japhet….stique Chanaan Servus ejus » La prédiction s’est accomplie. Dieu a dilaté, étendu au loin la domination de Japhet, du père commun des populations européennes, et les fils de Chanaan sont devenus ses esclaves. Que si l’on demande comment la postérité de Chanaan, exterminée jadis dans la Palestine, se retrouve vivante au milieu des sables de la Guinée, qu’il me soit permis de l’expliquer en peu de mots. D’abord, il n’est pas vrai que les peuples qui périrent sous le fer des Hébreux aient composé toute la race chanannéenne. La Genèse donne à Chanaan onze fils. L’aîné, Sidon, fut le père des Phéniciens, qui ne sont jamais tombés sous le glaive d’Israël. Après avoir nommé les dix autres, dont plusieurs ne paraissent point avoir habité la Palestine, puisque leurs noms ne se trouvent plus dans le récit de la conquête de Josué, le texte sacré ajoute : et après cela, les familles des Chaldéens se dispersèrent. Ces paroles, qui ne sont répétées par le saint livre pour aucun des enfans de Cham, de Sem, ni de Japhet, paraissent assigner à la postérité de Chanaan une diffusion plus rapide et plus lointaine qu’à ses frères. Sidon, en effet, le seul de cette race dont le nom soit demeuré historique, a porté ses colonies jusqu’à Carthage, et par Carthage, jusqu’aux extrémités du monde. Rien n’empêche donc de supposer que la grande famille éthiopienne soit descendue de Chanaan. Au contraire, l’affinité de cette famille et de la race Arabe, issu de chus, autre fils de Cham, éclate partout dans les livres saints. Chus est pris dans ces livres, tantôt pour désigner l’Arabie, tantôt pour l’Ethiopie. Le nom de Saba, de même : écrit par un schin, il s’applique à l’Yémen (l’Arabie heureuse) ; par un samech, il s’applique de l’Ethiopie. La bible ne dit-elle point que la femme de Moïse était Ethiopienne, en même tems qu’elle fait naître cette femme de la terre de Madian, qui était en Arabie ? Ces confusions tiennent sans doute à l’identité d’origine de la race éthiopienne et de la race arabe. Un autre témoignage de cette origine commune est la parenté des langues. L’idiome des peuples de la Sénégambie a des analogies frappantes avec l’arabe. Celui qui signe cette lettre tient cette affirmation de la propre bouche d’un homme qui a longtemps vécu avec les Nègres, M. Dard, auteur d’une grammaire wolofe et d’un dictionnaire français-wolofe et français-bambara, ouvrages distingués parl a Société de Géographie, et imprimés à l’imprimerie royale, avec une préface M.Jombard, de l’institut. Le même M.Dard raconte que les Nègres ont conservé la circoncision, non celle du huitième jour après la naissance, telle que la pratiquaient les Juifs, mais celle d’Ismaël, qui n’ayant été circoncis qu’à 13 ans n ‘avaient circoncis les siens qu’à l’âge voisin de la puberté, tradition respectée par les Arabes, ainsi que l’atteste l’historien Josèphe. Cette coutume existait en Egypte au tems d’Hérodote, le vieux conteur grec incline à la croire originaire d’Ethiopie. Elle est donc bien antérieure en Afrique à l’invasion du Mahométisme, dont les Nègres ne sont d’ailleurs que légèrement imprégnés. Au reste, les traditions religieuses et historiques des Wolofes les rattachent, par tous les points, à l’origine qu’on vient d’exposer. M.Dard m’a souvent attesté qu’ils croient descendre comme nous d’Adamo et d’Awa, et que le noùm de la première femme est encore aujourd’hui celui de beaucoup de Négresses. Ils prétendent que leurs pères ont régné sur l’Egypte, qu’ils appellent Mesraïm, comme le fait la Bible, du nom du second fils de Cham qui, d’après la Genèse, a peuplé l’Egypte. Ils ont conservé le souvenir, non-seulement d’Abraham, dont ils honorent le sacrifice par une fête commémoratoire appelée Tabaski, mais celui de Moysen qu’ils nomment Mousa, ce qui, en langue wolofe, signifie littéralement sauvé des eaux. Firaon, roi de Mesraïm, disent-ils, persécuta Mousa et les Youffres, sous la conduite le Mousa, se révoltèrent et s’enfuirent de Mesraïm. Firaon les pursuivit jusqu’à la mer du Levant (Ghéit ou Pinkou). Mais les eaux de la mer du Levantse séparèrent, laissant un libre passage aux Youffres, et Firaon, ayant tenté de les poursuivre, les eaux se rejoignirent, et il se noya. C’est à peu près dans les mêmes termes qu’Artapan, cité par Eusèbe, raconte le passage de la mer Rouge, d’après les prêtres d’Héliopolis. Il ajoute seulement que les habitants de Memphis expliquaient l’événement, lins de le mer, par le flux et le reflux de la mer. Je me hâte de prévenir une objection. Ces traditions des nègres sur Moyse ne sont point une réminiscence des notions qui leur ont été apportées par l’Islamisme. J’ai déjà dit que la religion de Mahomet n’avait point jeté chez eux de profondes racines. Mais, ce qui est singulièrement remarquable, et ce qui exclut toute idée de transmission des traditions musulmanes, c’est qu’au témoignage de M.Dard, les souvenirs de Sénégambie ne suivent point Moyse au-delà de la mer Rouge, au lieu que le Koran parle assez longuement du séjour de ce grand législateur en Arabie etc. On peut ajouter que la bibliothèque orientale d’Herbelot , fruit de trente années de recherches faites dans le Levant, à l’aide des plus fameux interprètes de la loi de Mahomet, a recueilli tout ce qu’ils exposent de la première moitié de la vie de Moyse, et qu’elle n’offre rien d’aussi complet, ni d’aussi précis que la tradition sénégambienne. Arrêtons-nous sur ce nom de Mousa, qui exprime nettement et sans recourir à aucune racine, l’idée que les livres saints ont attaché au nom de Moyse. Selon Moyse lui-même, ce nom, qui n’est point hébreu (voir tous les interprètes), lui dit imposé par la fille du roi d’Egypte : « et elle l’adopta pour son fils » la bible, et lui donna le nom de Moyse, disant : parce que je l’ai sauvé des eaux ». Depuis Philon jusqu’à dom Calmet, les rabbins et les commentateurs ont été fort embarrassés pour justifier la signification que le texte sacré assigne à ce nom. Ce n’est qu’indirectement et avec grand labeur que saint Clément d’Alexandrie, et depuis l’abbé Renaudot, l’ont fait dériver du copte, qui parait manifestement un reste de l’ancien idiome de l’Egypte. Toute difficulté cesserait si ce nom a été imposé au jeune Hébreu par une princesse du sang éthiopien. Et quelle confirmation puissante des récits des Nègres sur l’Egypte et sur le miracle de la mer Rouge ! Suivons cette idée : La domination éthiopienne en Egypte est un fait historiquement avéré. Le Sabacon d’Hérodote et de diodore de Sicile, le Zara des Paralipomènes, le Tharaca de la Bible, que Strabon, d’après Mégasthènes, qui était contemporain d’Alexandre, appelée Tharaca, sont autant d’Ethiopiens qui ont régné sur la terre de Mesraïm. Il faut ajouter à cette liste le Pharaon dont Salomon avait épousé la fille, puisqu’il fait dire à celle-ci, dans le Cantique des Cantiques : « Je suis noire, ô filles de Jérusalem, mais je suis belle… Ne me dédaignez pas, parce que je sois noire, parce que le soleil m’a regardée ». Josèphe l’historien attribue le double empire de l’Egypte et de l’Ethiopie à cette fameuse reine de Saba qui vint visiter ce même Salomon. Des preuves d’un autre ordre viennent confirmer ces témoignages. Ce qui nous reste du copte se rapproche sensiblement, selon Volney, de l’idiome des Ethiopiens et des Arabes, que cet incrédule reconnait être dérivé d’un fonds commun. Ce point, au reste, paraît hors de doute depuis les travaux de M.Klaproth Hérodote (liv.II) dit en propres mots : « Je pense que les Colches sont une colonie des Egyptiens, parce qu’ils ont comme eux la peau noire et les cheveux crépus », et Hérodote avait été en Egypte. Le Sphinx, gravé dans Nord et, c’est encore Volnay qui fait cette remarque, a visiblement tous les caractères d’une figure éthiopienne. C’est aussi Volney qui observe que les coptes d’aujourd’hui sont de véritables mulâtres, parce que leur sang, mêlé depuis des siècles à celui des Grecs et des Romains, a dû leur faire perdre l’intensité première de leur couleur, sans altérer sensiblement le moule originel de leur figure, et il rappelle à ce sujet, que Blumenbach a disséqué nombre de momies égyptiennes qu’il a lui-même rapportées à la race éthiopique. Le père Pezron est allé loin. Dans son Antiquité des tems rétablie, il articule qu’Abraham est venu en Egypte sous les rois pasteurs, que Joseph a été ministre du 4e de ces rois, et que Moyse, né sous leur empire, adopté par la fille de l’un d’eux, n’a lutté que contre leur expulseur. L’Exode, en effet (chap.2, v.23), nous apprend que le Pharaon ennemi de Moyse n’était plus le même que celui dont la fille avait sauvé le prophète enfant. Ce qui paraît décisif, c’est que Manéthon, dépositaire des annales des prêtres d’Héliopolis, sous le Ptolémée Philadelphie, donne cinq siècles d’existence à la domination des rois pasteurs, et confond leur expulsion avec la fuite des Hébreux, ainsi qu’on peut le voir dans Eusèbe. Or, le peuple qui envahit l’Egypte sous la conduite des rois pasteurs était un peuple inconnu. C’est par simple conjecture qu’on a vu là une migration d’Arabes. N’est-il pas plus naturel de la présumer éthiopien ? Ce que les Nègres, cette nation séparée de toutes les autres, nous racontent de l‘Egypte et de Moysen sans qu’ils puissent tenir ces récits des missionnaires de l’Islamisme, sans qu’ils aient gardé depuis des siècles aucun rapport avec le pays d’où ils ont été chassés, donne toute vraisemblance à cette hypothèse, et alors on conviendra que leurs traditions ont puisé à bonne source. Voilà, Messieurs, ce que j’avais à vous dire sur les Nègres et les étonnants souvenirs qu’ils ont conservés.
Votre numéro de novembre (ci-dessus, p.311), emprunte à M.Virey de nouveaux développements, à l’appui de l’opinion qui reconnaît dans les Nègres les héritiers de la malédiction de Chanaan. Cette idée, soutenue à la fin du dernier siècle par Bernardin de Saint-Pierre, n’a rien d’hostile, certes, à la race qui en est l’objet : la prédication de la Bonne-Nouvelle a mis fin à tous les anathèmes de la loi de crainte et de servitude ; Jésus-Christ est mort pur tous les hommes, et c’est à tous qu’il a été dit par la bouche de l’Apotre : Vos in libertetem vocati estis, fratres. L’esclavage des nègres est un anachronisme au milieu de nous, c’est en effet qui survit à sa cause, et qui cessera, comme l’incrédulité juive, au jour prédit où il n’y aura qu’un bercail et qu’un pasteur. Tel qu’il se perpétue sous nos yeux, ce fait si étrange n’en est pas moins un vivant témoignage des paroles de la Genèse. Car ce n’est point seulement aux fils de Sem que la malédiction patriarchale avait asservi Chanaan et ses fils. « Aït noe : Maledictus Chanaan ! Servus servorum erit fratribus suis… Benedictus Dominus Deus Sem, sit chanaan servus ejus ! Dilatet Deux Japhet….stique Chanaan Servus ejus » La prédiction s’est accomplie. Dieu a dilaté, étendu au loin la domination de Japhet, du père commun des populations européennes, et les fils de Chanaan sont devenus ses esclaves. Que si l’on demande comment la postérité de Chanaan, exterminée jadis dans la Palestine, se retrouve vivante au milieu des sables de la Guinée, qu’il me soit permis de l’expliquer en peu de mots. D’abord, il n’est pas vrai que les peuples qui périrent sous le fer des Hébreux aient composé toute la race chanannéenne. La Genèse donne à Chanaan onze fils. L’aîné, Sidon, fut le père des Phéniciens, qui ne sont jamais tombés sous le glaive d’Israël. Après avoir nommé les dix autres, dont plusieurs ne paraissent point avoir habité la Palestine, puisque leurs noms ne se trouvent plus dans le récit de la conquête de Josué, le texte sacré ajoute : et après cela, les familles des Chaldéens se dispersèrent. Ces paroles, qui ne sont répétées par le saint livre pour aucun des enfans de Cham, de Sem, ni de Japhet, paraissent assigner à la postérité de Chanaan une diffusion plus rapide et plus lointaine qu’à ses frères. Sidon, en effet, le seul de cette race dont le nom soit demeuré historique, a porté ses colonies jusqu’à Carthage, et par Carthage, jusqu’aux extrémités du monde. Rien n’empêche donc de supposer que la grande famille éthiopienne soit descendue de Chanaan. Au contraire, l’affinité de cette famille et de la race Arabe, issu de chus, autre fils de Cham, éclate partout dans les livres saints. Chus est pris dans ces livres, tantôt pour désigner l’Arabie, tantôt pour l’Ethiopie. Le nom de Saba, de même : écrit par un schin, il s’applique à l’Yémen (l’Arabie heureuse) ; par un samech, il s’applique de l’Ethiopie. La bible ne dit-elle point que la femme de Moïse était Ethiopienne, en même tems qu’elle fait naître cette femme de la terre de Madian, qui était en Arabie ? Ces confusions tiennent sans doute à l’identité d’origine de la race éthiopienne et de la race arabe. Un autre témoignage de cette origine commune est la parenté des langues. L’idiome des peuples de la Sénégambie a des analogies frappantes avec l’arabe. Celui qui signe cette lettre tient cette affirmation de la propre bouche d’un homme qui a longtemps vécu avec les Nègres, M. Dard, auteur d’une grammaire wolofe et d’un dictionnaire français-wolofe et français-bambara, ouvrages distingués parl a Société de Géographie, et imprimés à l’imprimerie royale, avec une préface M.Jombard, de l’institut. Le même M.Dard raconte que les Nègres ont conservé la circoncision, non celle du huitième jour après la naissance, telle que la pratiquaient les Juifs, mais celle d’Ismaël, qui n’ayant été circoncis qu’à 13 ans n ‘avaient circoncis les siens qu’à l’âge voisin de la puberté, tradition respectée par les Arabes, ainsi que l’atteste l’historien Josèphe. Cette coutume existait en Egypte au tems d’Hérodote, le vieux conteur grec incline à la croire originaire d’Ethiopie. Elle est donc bien antérieure en Afrique à l’invasion du Mahométisme, dont les Nègres ne sont d’ailleurs que légèrement imprégnés. Au reste, les traditions religieuses et historiques des Wolofes les rattachent, par tous les points, à l’origine qu’on vient d’exposer. M.Dard m’a souvent attesté qu’ils croient descendre comme nous d’Adamo et d’Awa, et que le noùm de la première femme est encore aujourd’hui celui de beaucoup de Négresses. Ils prétendent que leurs pères ont régné sur l’Egypte, qu’ils appellent Mesraïm, comme le fait la Bible, du nom du second fils de Cham qui, d’après la Genèse, a peuplé l’Egypte. Ils ont conservé le souvenir, non-seulement d’Abraham, dont ils honorent le sacrifice par une fête commémoratoire appelée Tabaski, mais celui de Moysen qu’ils nomment Mousa, ce qui, en langue wolofe, signifie littéralement sauvé des eaux. Firaon, roi de Mesraïm, disent-ils, persécuta Mousa et les Youffres, sous la conduite le Mousa, se révoltèrent et s’enfuirent de Mesraïm. Firaon les pursuivit jusqu’à la mer du Levant (Ghéit ou Pinkou). Mais les eaux de la mer du Levantse séparèrent, laissant un libre passage aux Youffres, et Firaon, ayant tenté de les poursuivre, les eaux se rejoignirent, et il se noya. C’est à peu près dans les mêmes termes qu’Artapan, cité par Eusèbe, raconte le passage de la mer Rouge, d’après les prêtres d’Héliopolis. Il ajoute seulement que les habitants de Memphis expliquaient l’événement, lins de le mer, par le flux et le reflux de la mer. Je me hâte de prévenir une objection. Ces traditions des nègres sur Moyse ne sont point une réminiscence des notions qui leur ont été apportées par l’Islamisme. J’ai déjà dit que la religion de Mahomet n’avait point jeté chez eux de profondes racines. Mais, ce qui est singulièrement remarquable, et ce qui exclut toute idée de transmission des traditions musulmanes, c’est qu’au témoignage de M.Dard, les souvenirs de Sénégambie ne suivent point Moyse au-delà de la mer Rouge, au lieu que le Koran parle assez longuement du séjour de ce grand législateur en Arabie etc. On peut ajouter que la bibliothèque orientale d’Herbelot , fruit de trente années de recherches faites dans le Levant, à l’aide des plus fameux interprètes de la loi de Mahomet, a recueilli tout ce qu’ils exposent de la première moitié de la vie de Moyse, et qu’elle n’offre rien d’aussi complet, ni d’aussi précis que la tradition sénégambienne. Arrêtons-nous sur ce nom de Mousa, qui exprime nettement et sans recourir à aucune racine, l’idée que les livres saints ont attaché au nom de Moyse. Selon Moyse lui-même, ce nom, qui n’est point hébreu (voir tous les interprètes), lui dit imposé par la fille du roi d’Egypte : « et elle l’adopta pour son fils » la bible, et lui donna le nom de Moyse, disant : parce que je l’ai sauvé des eaux ». Depuis Philon jusqu’à dom Calmet, les rabbins et les commentateurs ont été fort embarrassés pour justifier la signification que le texte sacré assigne à ce nom. Ce n’est qu’indirectement et avec grand labeur que saint Clément d’Alexandrie, et depuis l’abbé Renaudot, l’ont fait dériver du copte, qui parait manifestement un reste de l’ancien idiome de l’Egypte. Toute difficulté cesserait si ce nom a été imposé au jeune Hébreu par une princesse du sang éthiopien. Et quelle confirmation puissante des récits des Nègres sur l’Egypte et sur le miracle de la mer Rouge ! Suivons cette idée : La domination éthiopienne en Egypte est un fait historiquement avéré. Le Sabacon d’Hérodote et de diodore de Sicile, le Zara des Paralipomènes, le Tharaca de la Bible, que Strabon, d’après Mégasthènes, qui était contemporain d’Alexandre, appelée Tharaca, sont autant d’Ethiopiens qui ont régné sur la terre de Mesraïm. Il faut ajouter à cette liste le Pharaon dont Salomon avait épousé la fille, puisqu’il fait dire à celle-ci, dans le Cantique des Cantiques : « Je suis noire, ô filles de Jérusalem, mais je suis belle… Ne me dédaignez pas, parce que je sois noire, parce que le soleil m’a regardée ». Josèphe l’historien attribue le double empire de l’Egypte et de l’Ethiopie à cette fameuse reine de Saba qui vint visiter ce même Salomon. Des preuves d’un autre ordre viennent confirmer ces témoignages. Ce qui nous reste du copte se rapproche sensiblement, selon Volney, de l’idiome des Ethiopiens et des Arabes, que cet incrédule reconnait être dérivé d’un fonds commun. Ce point, au reste, paraît hors de doute depuis les travaux de M.Klaproth Hérodote (liv.II) dit en propres mots : « Je pense que les Colches sont une colonie des Egyptiens, parce qu’ils ont comme eux la peau noire et les cheveux crépus », et Hérodote avait été en Egypte. Le Sphinx, gravé dans Nord et, c’est encore Volnay qui fait cette remarque, a visiblement tous les caractères d’une figure éthiopienne. C’est aussi Volney qui observe que les coptes d’aujourd’hui sont de véritables mulâtres, parce que leur sang, mêlé depuis des siècles à celui des Grecs et des Romains, a dû leur faire perdre l’intensité première de leur couleur, sans altérer sensiblement le moule originel de leur figure, et il rappelle à ce sujet, que Blumenbach a disséqué nombre de momies égyptiennes qu’il a lui-même rapportées à la race éthiopique. Le père Pezron est allé loin. Dans son Antiquité des tems rétablie, il articule qu’Abraham est venu en Egypte sous les rois pasteurs, que Joseph a été ministre du 4e de ces rois, et que Moyse, né sous leur empire, adopté par la fille de l’un d’eux, n’a lutté que contre leur expulseur. L’Exode, en effet (chap.2, v.23), nous apprend que le Pharaon ennemi de Moyse n’était plus le même que celui dont la fille avait sauvé le prophète enfant. Ce qui paraît décisif, c’est que Manéthon, dépositaire des annales des prêtres d’Héliopolis, sous le Ptolémée Philadelphie, donne cinq siècles d’existence à la domination des rois pasteurs, et confond leur expulsion avec la fuite des Hébreux, ainsi qu’on peut le voir dans Eusèbe. Or, le peuple qui envahit l’Egypte sous la conduite des rois pasteurs était un peuple inconnu. C’est par simple conjecture qu’on a vu là une migration d’Arabes. N’est-il pas plus naturel de la présumer éthiopien ? Ce que les Nègres, cette nation séparée de toutes les autres, nous racontent de l‘Egypte et de Moysen sans qu’ils puissent tenir ces récits des missionnaires de l’Islamisme, sans qu’ils aient gardé depuis des siècles aucun rapport avec le pays d’où ils ont été chassés, donne toute vraisemblance à cette hypothèse, et alors on conviendra que leurs traditions ont puisé à bonne source. Voilà, Messieurs, ce que j’avais à vous dire sur les Nègres et les étonnants souvenirs qu’ils ont conservés.