Accueil > Généalogies racialo-religieuses > Cham, d'après Bayle
Cham, d'après Bayle
Droits :
domaine public
Source
Gallica.bnf.fr
Relation
Bibliothèque nationale de France
Citer ce document
Bayle, Pierre “Cham, d'après Bayle”, RelRace, item créé par Mathilde Plais, dernier accès le 7 Dec. 2024.
Contributeur
Mathilde Plais
Collection
Sujet
Légendes autour de Cham
Description
Entrée Cham dans le Dictionnaire historique et critique (tome 2) dans l'édition de 1734.
Géolocalisation
Transcription
Voir moins
Voir plus
CHAM, le plus jeune des trois fils de Noé (A). On ne fait de lui autre chose, sinon qu'il alla dire à ses freres qu'il avoit vu Noé tout nu dans sa tente. Sur ce fait unique on a bâti je ne sais combien de grotesques ; un peu de levain a fait lever en cette rencontre une énorme quantité de pâte. On a cru que puis que Cham fit paroître tant d'inscrétion envers son pere, c'etoit une ame maudite , qui avoit commis toutes sortes d'abominations. On le fait: l'Inventeur de la Magie (B), et en conte bien des choses la-dessus : on veut qu'il ait donné un exemple d'incontinence peu édifiant (C) c'est-à-dire qu'il ait engrossé sa femme dans l'arche même. Il y en a qui disent que la faute, qu'il commit envers son pere, fut infiniment plus atroce que l'on ne la represente dans la Sainte Ecriture. Les uns veulent qu'il l'ait châtré (D) ; les autres qu'il l'ait rendu impuissant par la vertu de quelques charmes magiques (E ); les autres qu'il se soit plongé dans l'inceste avec la femme de Noé (F).Ce qu'il y a d'assez étrange, c'est que l'Ecriture ne marque point que ce Patriarche ait rien fait à Cham : il ne lui dit pas meme un mot de ceniure, il le contenta de maudire Chanaan fils de Cham; mais cette malédiction n'etoit autre chose qu'une Prophétie des viaoires que les descendans de Sem remporteroient sur les descendans de Chanaan sous Jolue , c'est-à-dire, sept ou huit siecles après la faute de Cham. Voilà toute la punition de ce fils mal né; car c'en: un Conte chimérique, que ce que l'on dit ordinairement qu 'il devine noir, & qu'il communiqua sa noirceur à ses descendans , & que de là vient qu'encore aujourd'hui il y a tant de peuples noirs dans l'Afrique. Il y a beaucoup d'apparence qu'il s'établit en Egypte (b) & qu'il y fut adoré après sa mort fous le nom de Jupiter Hammon. On a répondu de plaisantes choses a la question, comment Noé fut que Cham en avoit si malulé envers lui (c). Mr. Moreri n'a a pas dû dire, ni que Cham se moqua de Noé en le voiant nu, ni que Chanaan fut le prémier qui s'aperçut de la nudité de Noé , & qu 'il alla dire a ion pere ce qu 'il avoit vu car l'Ecriture , ni aucun Auteur qui ait pu savoir la chose, n ont rien dit de tout cela. Si Mr.Morcri nous eût donné ces deux faits pour la conjecture de quelques Commentateurs, on ne pourroit pas le reprendre -, mais il les donne comme une partie de l'Histoire de Cham copiée de l'écriture. C'est là le mal.
(A) Le plus jeunes des trois fils de Noé. Cela est clair, & inconcevable, puisque l'Ecriture marque expressement, après avoir recité l'action de Cham, que Noé éveillé de son vin fut ce que son fils LE PLUS PETIT avoit fait (i). Et néanmoins, une infinité deCommentateurs soutiennent que Cham étoit le sécond des fils de Noé ; ils préferent à une déclaration aussi nette que celle-là les paroles où les trois freres font rangez de cette façon, Sem, Cham, & Japbet (2) : & pour éluder le verset 2.4 que je cite , il y en a qui prétendent que l'Ecriture ne parle point là de Cham 3 mais de Chanaan petit-fils de Noé. D'autres prétendent que Cham n'a été apellé le plus petit ou le plus jeune qu'à cause que là conduite étoit moins prudente que celle de ses autres freres (3). N'est-ce point ouvrir la porte à des Gloses qui feroient capables d'obscurcir les expressions les plus claires de l'Ecriture ?.
(B) On le fait l'Inventeur de la Magie. En ce sens quece fut lui seul qui la conserva ,& qui la fait passer dans le nouveau monde. C'est ainsi que j'apelle les descendants de Noé. Du reste, ce ne fut point Cham qui inventa cette noire Science : ce surent les Anges amoureux du sexe qui l'enseignerent aux hommes (4) ; mais comme Cham n'osa point porter avec lui dans l'arche les Livres qui concernoient cette matiere , il en grava les principaux dogmes sur des corps très-durs qui pouvoient réfifter aux eaux du déluge : il cacha soigneusement ce thrésor ; & après qu'on fut forti de l'Arche, il le retira du lieu où il l'avoit mis. On lit ces fadaises dans Cassien : Quantum, dit-il, (5) , antique traditiones serunt, Cham filius Noé , qui fuperflitionlbus issis , & facrilegis fuit artibus & propbnms inf etus, sciens nulium se posse super his memorialem librum in aram prorsus in ferre ; in quam erat una cum patre juflo, & fancris frlttribus ingrejfurus, feelefias artes & propbana commenta diverforum metallorum laminis, qua fcilicet aquarum non corrumperentur injuria 3 & durifji. mis lapidibus infculpfit. Qud diluvio peraito , eadem qua illa celaverat curiojitute perquirens , sacr .legiorum acperpetudt, nequiÙA seminarium tranfmifit ad pojleros. On prétend que, Misraim fils de Cham a prit de son pere tous ces abominables secrets, & l;i¡ les Séctateurs de cette Science regardérent Cham comme leur prémier Fondateur et le nommerent Zoroastre c'est à-dire l'Astre vivant, & l'honnorèrent comme un Dieu. Cbltmum eumden: efievelunt cum ZrøaJlre M.so. Hujus fententitt primus autuor quod quidem fciam, est Pfeudoclemens qui libro 4 Recognitionllm jMagiam scribit hominibus ante diluvitm a muiierofis illis Allglis traditam Ægyptiorum conditorem Mefrai- tnum didictffe a Chamo patre , & ChtttIJum À poster;s hujus artis admiratoribus Zoroafirem, feuvivum afirum )Iproptere. suiffe dittum & pro Deo habitum (6). Voyez ci-dessous la Remarque (E).
(C) On veut qu'il ait donné un exemple d'incontinence peu édifiant. St. Ambroise trouve que les expressions de Moïse nous portent à croire, que les fonctions matrimoniales furent furfifes & suspendues pendant qu'on vécu dans l'arche. C'étoit alors, disent quelques Interprétés, qu'il faloit songer à la Maxime que Salomon a publiée long-tems après: A toute chose sa faison, & à toute affaire fous les cieux son tems ... tems d'embrasser, & tems de s'éloigner de l'embrassement (7). Le terrible jugement , que Dieu éxerçoit sur le genre humain > ne devoir inspirer à Noé & à sa famille que des pensées de jeûne & de pénitence Qui (Ambrosius) etiam notavit tam in ingrejfu, quamin egreffu arct , feorfim viros omnes ab uxoribus nominari ; ut ex ipsa defcriptione infinuaretur perseverans conjugum continemia ab ingreffu ad egreffum usque:idque admodum verifimiliter. NAm, ut ait Salomon, Tempus amplexandi, & tempus longe fieri ab amplexione... Et vtro lachrymarum potius, & rationum id tempus fuit adplac atidtim divinam iram , horribilem in modum sevientem (8). Néanmoins, c'est une opinion assez répandue; que Cham ne se contint point, & que sa femme devint mere de Chanaan dans l'arche même. On dit aussi, qu'à cause que Chanaan étoit le fruit d'une incontinence exercée hors de saison, il fût méchant. C'est lui dit-on, qui s'aperçut le premier de la nudité de Noé, qui en avertit son pere avec des airs de moquerie. Si cela étoit on comprendroit mieux pourquoi la malédiction de Noé tomba sur Chanaan, & non pas sur Cham. Quand on deman-de à quelques Docteurs par quel moyen ce Patriarche vint à conoitreque c'étoit Cham qui avoir révélé sa nudité, ils répondent qu il l'infera de l'effronterie que Cham avoit eue de profaner l'arche en s'aprochant de sa femme. Conjecturim Hebïîàkom-minifcuntur ejufmoâi. Nempe Noachum in ipft adhuc arca Chamilibidinofum animum arcam intempeftiva Venere polluentis notaffe. Hinc expergefaftum fidtim culpam ludibrii hujus in eundem conjecifie. Raportons par occasion la réponse que sont d'autres:ils disent que Cham, dès qu'il eut repu sa vue d'un tel objet, soussrit des changemens extraordinaires sur son corps. Les yeux lui devinrent rouges; ses cheveux & sa Barbe furent brûlez : ses levres se rôtirent; il savoit si peu ce qu'il faisoit, qu'il se dépouilla tout nu, & marcha en cette pondre. Noé voyant toutes ces choses , en conclut que c'étoit Cham qui l'avoit deshonoré. Mais quelques-uns veulent qu'il n'ait su cela que par les lumiéres de la Prophétie. St. Chryfofiome est très-raisonnable, lors qu'il croit que Noé, s'étant vû couvert d'un manteau qui ne lui apartenoit pas, demanda ce que c'étoit, & aprit de ses deux bons fils comment la chose s'étoit passée (10).
(D) Les uns veulent qu'il ait châtré son propre père. Quelques Docteurs Juifs ont débité qu'il se porta à cet acte en étant violent afin d'empêcher que Noé ne lui donnât de nouveaux freres. Faloit-il qu'il craignit que sa portion dans le partage de tout le monde ne fût trop petite ? Des gens graves ont pris la peine de de réfuter cela fort serieusement par ces paroles de l'Ecriture : Noé éveillé de son vin fut ce que son fils le plus petit lui avoit fait. Si l'on eût fait sur lui disent-ils une opération aussi douloureuse que celle dont il est question, il n'auroit pas attendu à se réveiller qu'il eût pu cuver son vin : la douleur l'auroit éveille bien vite, il auroit surpris le malfaiteur sur le fait même, & n'auroit pas eu besoin de demander qui c'étoit. Id Scriptura satis refellit qiu ait Noe cùm ex vino evigilajfet didicifie quajeccreit etfilius juus. At non evigilajja e vino, confumptis yfcilicet vaporibus, fèd ingenti dotore Jummus excujjusfuijjct nec opusjuiffet dijcere quid feciJJet Cbam,fed eurn in ipj() facinfJre depïtbi:1ldiffit
(E)...les autres qu'ill l'ait rendu impuissannt par la vertu de quelques charmes magiques. Le Berose de l'Imposteur de Viterbe nous aprend cette rêverie. Il dit que Noé ne pouvant souffrir les mœurs déréglées de son fils Cham, qui s'étoit aquis le furnomde Zoroastre à cause de son attachement à la magie devint odieux à ce fils, & cela d'autant plus facilement qu'il avait beaucoup de tendresse pour ses autres fils plus jeunes que Cham. Celui-ci trouvant une occassion de vengeance ne la sait à point échaper. Il empoigna les parties naturelles de son pere cuvant son vin, & se mit à marmoter quelques paroles qui le rendirent impuissant pour le reste de ses jours. Nactils oppurtunitatem, cttm Noe pater madidus jaceret, iilius virilia comprehelldens taciteque fubmurmurllns, carminé tnagicg patri il iifit, simul &fier il en perinde atque cafiratum effecit, ne que dcinceps Noefœmellam aliquam fœcundarepotuit. Ce ne fut pas néanmoins ce qui porta Noé à chasser ce fils; il le chasse pour ses autres crimes. Ce malheureux enseignoit qu'il faloit vivre comme on faisoit avant le déluge, commettre toutes fortes d'incestes & quelque chose de pis, & il pratiquoit ses leçons abominables. At vero Cham cum publice corrumperet mort aie genus afferens & re ipsa exequens congrediendum effe, ut ante inundationem, cum matribils, fororibus, filiabslS, mafculis, brutis, & quovis alio gêner e, ob hoc ejectus à Jano piijjimo & caftimollia atque pudicitia refertiflimo (16). Que cela ne nous préoccupe point contre Cham, l'Auteur que je cite n'est qu'un tissu de fictions, & de chimeres. Les Rabi. ne méritent pas plus de foi, lorsqu'ils disent ce qu'il leur plaît touchant la conduite de Cham. Considérez ces paroles de Gabriel Naudé (17) : félon le Rabi Samuel (*), il fit à son pere » une chose si vilaine & abominable, que je n'en « veux rien dire, de peur de heurter les chasles aureilles, que ce qui fut dit autrefois par Laurens » Valle sur la rencontre d'un mot de pareille vile nie & signification, malo igmrari quam me docente 0.9 coanofci U.
(F):... les autres qu'il se soit plongé dans l'inceste avec la femme de Noé. C'est le sentiment de Mr. Von der Hart, Professèur aux Langues Orientales dans l'Académie de Helmftad. Il croit que l'injure que ce Patriarche reçut de Cham consista dans l'infâme témérité qu'eut ce fils brutal de coucher, ou avec sa propre mere , ou du moins avec sa marâtre. Il prouve cette explication par divers endroits de l'Ecriture, où la Phrase découvrir la honte d'une femme lignifie coucher avec elle. Dans les mêmes endroits de l'Ecriture il est dit que la nudité ou la honte d'une femme est la nudité ou lahonte de son mari ; & par conséquent, selon ce cyle, avoir vu la nudité de Noé, est une façon de parler envelopée, qui lignifie avoir eu à faire avec la femme de Noé. Ctt Auteur fupofc, I, que Cham prit son tems pour faire ce coup, lorsque Noé cuvait [on vin. II. Quelcun s'erant aperçu de l'attentat, courut en donner avis aux deux autres fils de Noé. Ill. Queceux-ci, indignez de l'auront sanglant qu'on failoit au Patriarche, se transportèrent sur les lieux au plus vite , & qu'aiant surpris leur frere en flagrant délit, ils jettérent leurs manteaux sur lui & sur sa complice. IV. Qu'ils firent raport à leur pere de tout ce qu'ils avoient vu. V. Que Noé fort en colere ordonna par son Testament, que Chanaân qui devoit naître de ce commerce incestueux seroit entièrement privé de la succession ( 18). Ces Hypotheses sont dottes & ingénieuses; mais si une foisil est permis de supposer que les Narrations de Moïse font si déguisées, il est à craindre qu'on ne transporte cette méthode jusques à l'Histoire de la tentation, & de la chute d'Adam, comme quelques-uns ont osé le faire.
(A) Le plus jeunes des trois fils de Noé. Cela est clair, & inconcevable, puisque l'Ecriture marque expressement, après avoir recité l'action de Cham, que Noé éveillé de son vin fut ce que son fils LE PLUS PETIT avoit fait (i). Et néanmoins, une infinité deCommentateurs soutiennent que Cham étoit le sécond des fils de Noé ; ils préferent à une déclaration aussi nette que celle-là les paroles où les trois freres font rangez de cette façon, Sem, Cham, & Japbet (2) : & pour éluder le verset 2.4 que je cite , il y en a qui prétendent que l'Ecriture ne parle point là de Cham 3 mais de Chanaan petit-fils de Noé. D'autres prétendent que Cham n'a été apellé le plus petit ou le plus jeune qu'à cause que là conduite étoit moins prudente que celle de ses autres freres (3). N'est-ce point ouvrir la porte à des Gloses qui feroient capables d'obscurcir les expressions les plus claires de l'Ecriture ?.
(B) On le fait l'Inventeur de la Magie. En ce sens quece fut lui seul qui la conserva ,& qui la fait passer dans le nouveau monde. C'est ainsi que j'apelle les descendants de Noé. Du reste, ce ne fut point Cham qui inventa cette noire Science : ce surent les Anges amoureux du sexe qui l'enseignerent aux hommes (4) ; mais comme Cham n'osa point porter avec lui dans l'arche les Livres qui concernoient cette matiere , il en grava les principaux dogmes sur des corps très-durs qui pouvoient réfifter aux eaux du déluge : il cacha soigneusement ce thrésor ; & après qu'on fut forti de l'Arche, il le retira du lieu où il l'avoit mis. On lit ces fadaises dans Cassien : Quantum, dit-il, (5) , antique traditiones serunt, Cham filius Noé , qui fuperflitionlbus issis , & facrilegis fuit artibus & propbnms inf etus, sciens nulium se posse super his memorialem librum in aram prorsus in ferre ; in quam erat una cum patre juflo, & fancris frlttribus ingrejfurus, feelefias artes & propbana commenta diverforum metallorum laminis, qua fcilicet aquarum non corrumperentur injuria 3 & durifji. mis lapidibus infculpfit. Qud diluvio peraito , eadem qua illa celaverat curiojitute perquirens , sacr .legiorum acperpetudt, nequiÙA seminarium tranfmifit ad pojleros. On prétend que, Misraim fils de Cham a prit de son pere tous ces abominables secrets, & l;i¡ les Séctateurs de cette Science regardérent Cham comme leur prémier Fondateur et le nommerent Zoroastre c'est à-dire l'Astre vivant, & l'honnorèrent comme un Dieu. Cbltmum eumden: efievelunt cum ZrøaJlre M.so. Hujus fententitt primus autuor quod quidem fciam, est Pfeudoclemens qui libro 4 Recognitionllm jMagiam scribit hominibus ante diluvitm a muiierofis illis Allglis traditam Ægyptiorum conditorem Mefrai- tnum didictffe a Chamo patre , & ChtttIJum À poster;s hujus artis admiratoribus Zoroafirem, feuvivum afirum )Iproptere. suiffe dittum & pro Deo habitum (6). Voyez ci-dessous la Remarque (E).
(C) On veut qu'il ait donné un exemple d'incontinence peu édifiant. St. Ambroise trouve que les expressions de Moïse nous portent à croire, que les fonctions matrimoniales furent furfifes & suspendues pendant qu'on vécu dans l'arche. C'étoit alors, disent quelques Interprétés, qu'il faloit songer à la Maxime que Salomon a publiée long-tems après: A toute chose sa faison, & à toute affaire fous les cieux son tems ... tems d'embrasser, & tems de s'éloigner de l'embrassement (7). Le terrible jugement , que Dieu éxerçoit sur le genre humain > ne devoir inspirer à Noé & à sa famille que des pensées de jeûne & de pénitence Qui (Ambrosius) etiam notavit tam in ingrejfu, quamin egreffu arct , feorfim viros omnes ab uxoribus nominari ; ut ex ipsa defcriptione infinuaretur perseverans conjugum continemia ab ingreffu ad egreffum usque:idque admodum verifimiliter. NAm, ut ait Salomon, Tempus amplexandi, & tempus longe fieri ab amplexione... Et vtro lachrymarum potius, & rationum id tempus fuit adplac atidtim divinam iram , horribilem in modum sevientem (8). Néanmoins, c'est une opinion assez répandue; que Cham ne se contint point, & que sa femme devint mere de Chanaan dans l'arche même. On dit aussi, qu'à cause que Chanaan étoit le fruit d'une incontinence exercée hors de saison, il fût méchant. C'est lui dit-on, qui s'aperçut le premier de la nudité de Noé, qui en avertit son pere avec des airs de moquerie. Si cela étoit on comprendroit mieux pourquoi la malédiction de Noé tomba sur Chanaan, & non pas sur Cham. Quand on deman-de à quelques Docteurs par quel moyen ce Patriarche vint à conoitreque c'étoit Cham qui avoir révélé sa nudité, ils répondent qu il l'infera de l'effronterie que Cham avoit eue de profaner l'arche en s'aprochant de sa femme. Conjecturim Hebïîàkom-minifcuntur ejufmoâi. Nempe Noachum in ipft adhuc arca Chamilibidinofum animum arcam intempeftiva Venere polluentis notaffe. Hinc expergefaftum fidtim culpam ludibrii hujus in eundem conjecifie. Raportons par occasion la réponse que sont d'autres:ils disent que Cham, dès qu'il eut repu sa vue d'un tel objet, soussrit des changemens extraordinaires sur son corps. Les yeux lui devinrent rouges; ses cheveux & sa Barbe furent brûlez : ses levres se rôtirent; il savoit si peu ce qu'il faisoit, qu'il se dépouilla tout nu, & marcha en cette pondre. Noé voyant toutes ces choses , en conclut que c'étoit Cham qui l'avoit deshonoré. Mais quelques-uns veulent qu'il n'ait su cela que par les lumiéres de la Prophétie. St. Chryfofiome est très-raisonnable, lors qu'il croit que Noé, s'étant vû couvert d'un manteau qui ne lui apartenoit pas, demanda ce que c'étoit, & aprit de ses deux bons fils comment la chose s'étoit passée (10).
(D) Les uns veulent qu'il ait châtré son propre père. Quelques Docteurs Juifs ont débité qu'il se porta à cet acte en étant violent afin d'empêcher que Noé ne lui donnât de nouveaux freres. Faloit-il qu'il craignit que sa portion dans le partage de tout le monde ne fût trop petite ? Des gens graves ont pris la peine de de réfuter cela fort serieusement par ces paroles de l'Ecriture : Noé éveillé de son vin fut ce que son fils le plus petit lui avoit fait. Si l'on eût fait sur lui disent-ils une opération aussi douloureuse que celle dont il est question, il n'auroit pas attendu à se réveiller qu'il eût pu cuver son vin : la douleur l'auroit éveille bien vite, il auroit surpris le malfaiteur sur le fait même, & n'auroit pas eu besoin de demander qui c'étoit. Id Scriptura satis refellit qiu ait Noe cùm ex vino evigilajfet didicifie quajeccreit etfilius juus. At non evigilajja e vino, confumptis yfcilicet vaporibus, fèd ingenti dotore Jummus excujjusfuijjct nec opusjuiffet dijcere quid feciJJet Cbam,fed eurn in ipj() facinfJre depïtbi:1ldiffit
(E)...les autres qu'ill l'ait rendu impuissannt par la vertu de quelques charmes magiques. Le Berose de l'Imposteur de Viterbe nous aprend cette rêverie. Il dit que Noé ne pouvant souffrir les mœurs déréglées de son fils Cham, qui s'étoit aquis le furnomde Zoroastre à cause de son attachement à la magie devint odieux à ce fils, & cela d'autant plus facilement qu'il avait beaucoup de tendresse pour ses autres fils plus jeunes que Cham. Celui-ci trouvant une occassion de vengeance ne la sait à point échaper. Il empoigna les parties naturelles de son pere cuvant son vin, & se mit à marmoter quelques paroles qui le rendirent impuissant pour le reste de ses jours. Nactils oppurtunitatem, cttm Noe pater madidus jaceret, iilius virilia comprehelldens taciteque fubmurmurllns, carminé tnagicg patri il iifit, simul &fier il en perinde atque cafiratum effecit, ne que dcinceps Noefœmellam aliquam fœcundarepotuit. Ce ne fut pas néanmoins ce qui porta Noé à chasser ce fils; il le chasse pour ses autres crimes. Ce malheureux enseignoit qu'il faloit vivre comme on faisoit avant le déluge, commettre toutes fortes d'incestes & quelque chose de pis, & il pratiquoit ses leçons abominables. At vero Cham cum publice corrumperet mort aie genus afferens & re ipsa exequens congrediendum effe, ut ante inundationem, cum matribils, fororibus, filiabslS, mafculis, brutis, & quovis alio gêner e, ob hoc ejectus à Jano piijjimo & caftimollia atque pudicitia refertiflimo (16). Que cela ne nous préoccupe point contre Cham, l'Auteur que je cite n'est qu'un tissu de fictions, & de chimeres. Les Rabi. ne méritent pas plus de foi, lorsqu'ils disent ce qu'il leur plaît touchant la conduite de Cham. Considérez ces paroles de Gabriel Naudé (17) : félon le Rabi Samuel (*), il fit à son pere » une chose si vilaine & abominable, que je n'en « veux rien dire, de peur de heurter les chasles aureilles, que ce qui fut dit autrefois par Laurens » Valle sur la rencontre d'un mot de pareille vile nie & signification, malo igmrari quam me docente 0.9 coanofci U.
(F):... les autres qu'il se soit plongé dans l'inceste avec la femme de Noé. C'est le sentiment de Mr. Von der Hart, Professèur aux Langues Orientales dans l'Académie de Helmftad. Il croit que l'injure que ce Patriarche reçut de Cham consista dans l'infâme témérité qu'eut ce fils brutal de coucher, ou avec sa propre mere , ou du moins avec sa marâtre. Il prouve cette explication par divers endroits de l'Ecriture, où la Phrase découvrir la honte d'une femme lignifie coucher avec elle. Dans les mêmes endroits de l'Ecriture il est dit que la nudité ou la honte d'une femme est la nudité ou lahonte de son mari ; & par conséquent, selon ce cyle, avoir vu la nudité de Noé, est une façon de parler envelopée, qui lignifie avoir eu à faire avec la femme de Noé. Ctt Auteur fupofc, I, que Cham prit son tems pour faire ce coup, lorsque Noé cuvait [on vin. II. Quelcun s'erant aperçu de l'attentat, courut en donner avis aux deux autres fils de Noé. Ill. Queceux-ci, indignez de l'auront sanglant qu'on failoit au Patriarche, se transportèrent sur les lieux au plus vite , & qu'aiant surpris leur frere en flagrant délit, ils jettérent leurs manteaux sur lui & sur sa complice. IV. Qu'ils firent raport à leur pere de tout ce qu'ils avoient vu. V. Que Noé fort en colere ordonna par son Testament, que Chanaân qui devoit naître de ce commerce incestueux seroit entièrement privé de la succession ( 18). Ces Hypotheses sont dottes & ingénieuses; mais si une foisil est permis de supposer que les Narrations de Moïse font si déguisées, il est à craindre qu'on ne transporte cette méthode jusques à l'Histoire de la tentation, & de la chute d'Adam, comme quelques-uns ont osé le faire.