Quaestiones in Genesim

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Philon d'Alexandrie “Quaestiones in Genesim”, RelRace, , dernier accès le 29 Mar. 2024.
Sujet Cham et Canaan
Description Philon répond à la question de savoir pourquoi Noé maudit Canaan pour la faute de son père. Il présente également la filiation de Cham à travers Chus/Cush et Nemrod
Auteur Philon d'Alexandrie
Date Ier s.
Langue la

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Pourquoi, alors que c'est Cham qui a transgressé, (Noé) déclare-t-il son fils Chanaan serviteur de Sem et de Japhet? (Gen. 9,27)
D'abord, parce qu'ils ont fait preuve de la même perversité tous les deux, le père et le fils, mélangés et non séparés, comme s'y appliquant tous les deux dans un seul corps et avec une seule âme. Mais, deuxièmement, parce que le père devait aussi s'attrister intensément de la malédiction du fils, puisqu'il savait que celui-ci était puni moins pour lui-même que pour son père, le chef et le docteur des pensées, paroles et actions mauvaises. Voilà la lettre. Quant au sens allégorique, virtuellement ils sont deux, moins des hommes que des caractères, et l'imposition des noms le fait connaître clairement, en faisant connaître aussi la nature des choses. En effet, Cham se traduit « chaleur » et « chaud », et Chanaan, « marchands » ou « intermédiaires ».
(…)
Pourquoi Chus (est-il) le fils aîné de Cham? (Gen. 10,6)
C'est un mot très profond que le théologien a prononcé en disant fils aîné du mauvais, Chus, la nature dispersée de la terre. En effet, cette terre au sol épais, qui nourrit du bétail, à l'eau abondante, au riche fourrage, aux plantureuses moissons, fournie en arbres, a été distribuée en productions de fruits, mais (la terre) dispersée, poudreuse comme de la poussière, est aride, infertile, improductive et stérile, et (la terre) est prise et portée en haut par le vent et elle endommage, par la poussière, l'air vivifiant. Tels sont les premiers bourgeons du mauvais, improductifs et stériles en bon zèle, mais ils sont aussi une cause d'improductivité en toutes les parties de l'âme.
Pourquoi Chus engendre-t-il Nemrod, qui commença à être un géant chasseur en face du Seigneur et, pour cette raison, on dira : Gomme Nemrod, géant chasseur en face de Dieu? (Gen. 10,8-9)
C'est à juste titre qu'ayant la nature dispersée, qu'un lien spirituel ne rassemble ni ne resserre, (n'étant) un père de fermeté ni de l'âme ni de la nature ni de la conduite, à la façon d'un géant préférant les choses terrestres aux célestes, il rend véridique la fable qui concerne les Géants et les Titans. En effet, vraiment, celui qui a le zèle des choses terrestres et corruptibles lutte sans cesse et livre bataille aux natures célestes, dignes de louange et admirables, élevant un rempart et construisant la terre comme une tour contre le ciel. Mais les choses d'ici-bas sont opposées aux choses de là-haut ; pour ces motifs, ce n'est pas sans raison que se trouve l'expression « Il était géant en face de Dieu », ce qui est révélateur d'une opposition à la divinité ; en effet, l'impie, qui n'est rien d'autre qu'un ennemi, cerne Dieu. C'est pourquoi aussi dans les proverbes, il faut que quiconque commet de très grands péchés soit rapporté à celui-là comme au guide et au premier prince, (proverbes) qui disent : « Comme Nemrod ». Or ce nom-là est révélation de choses, car il se traduit « Éthiopien » ; quant au métier, c'est celui de la chasse, et tous les deux sont à blâmer : l'Éthiopien, parce que le mal sans mélange n'a pas part à la lumière, il imite la nuit et les ténèbres ; quant au « métier » de la chasse, combien il est étranger à la nature douée de raison ! et celui qui est avec les bêtes sauvages désire vivre à la façon des bêtes, en s'égalant aux bêtes par les passions du mal.
Quare, Cham deliquente, ejus filium Chanaan servum déclarat Sem, et Japheth?
Primum, quia eandem malitiam usurparunt pater et filius, mixti et indisjuncti tamquam uno corpore unoque animo utentes ambo. Secundo vero, quia fîlii maledictione et pater vehementer contristaturus erat, satis conscius quod ille non adeo propter se, quantum propter patrem castigatur ; sic poenam luit dux et magister malorum consiliorum, verborum, et operum. Littera his continetur. Ad mentem vero virtualiter duo sunt non homines potius quam mores : id prodit et appellatio nominum, manifeste denotans et rerum naturam ; interpretatur enim Cham, calor, sive calidus, Chanan autem mercalores, vel caussae.
(…)
Quare Cham major filins (sit) Chus?
Naturalissimum protulit verbum Theologus, mali natum majorem dicens Chus, dissolutam ac dispersam terrae naturam : nam terra densa, fertilis, aquosa, herbis, cristis, arboribusque referta, distrîbuta est in fructuum germinationes : dissoluta vero et in pulverem redacta, arida est et infructuosa sterilisque : adhaec in altum fertur a vento elevata, pulvere conficiens aera vitalem. Hujusmodi sunt mali germina prima, expertia generationis bonorum studiorum, et causae sterilitatis animae partiumque ejus omnium.
Quare Chus genuit Nemrod, qui coepit esse gigas venator contra Dominum : quare dixerint, Sicut Nemrod gigas venator contra Deum?
Révera habens dissolutam naturam, quam ligamen spirituale minime constringit, nec animae, nec naturae, neque morum constantiae pater, gigantis more terrena praeponens caelestibus, verificare vide- tur illam de Gigantibus et Titanis fabulam. Nam profecto qui aemulator est terrestrium et corruptibi- lium, semper pugnam committit cum caelestibus mirisque naturis, aggerem construens terram contra caelum : atqui quae deorsum sunt, adversantur iis quae sursum. Quamobrem non frustra se habet illud, Erat gigas conlra Deum, declarans adversitatem in divinitatem. Impius enim nihil aliud est, nisi inimicus certans circa Deum. Unde in proverbium cedit, quod omnis qui graviter peccat, debet ad istum referri sicut ad auctorem ac principem, dictas, quasi aller Nemrod. Nomen ipsum itaque est mani- festatio rerum ; nam interprebatur Aethiops, et ars venatoria ; quorum utrumque detestandum : Aethiops, quia mera malitia non habet participationem lucis, sed noctem tenebrasque imitatur : venatora vero ais quam maxime alienatur a rationali natura : qui enim cum feris degit, optât vitam ducere bestialem, ut coaequari brutis cum vitiis malitiae.