Reconnaissances

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Clément d'Alexandrie “Reconnaissances”, RelRace, item créé par Mathilde Plais, dernier accès le 21 Nov. 2024.
Contributeur Mathilde Plais
Sujet Cham, ancêtre de Zoroastre
Description

Dans ses Reconnaissances, Clément d’Alexandrie y fait de Cham le premier des magiciens et associe sa descendance à Zoroastre.

Auteur Clément d'Alexandrie
Éditeur Manuscrit latin du XIe s.
Langue la

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Origines de l’idôlatrie

26        1 « Maintenant donc, puisque vous ne comprenez pas encore de quelles ténèbres d'ignorance vous êtes enveloppés, je veux pour l'instant vous exposer d'où est venue dans ce monde l'initiative du culte des idoles. 2 Et par idoles, j'entends les images inanimées que vous adorez, qu'elles soient de bois, d'argile, de pierre, de bronze ou de tout autre métal. 3 Voici donc quelle en est l'origine : certains anges, s'étant écartés du cours imparti à leur ordre propre, se mirent à favoriser les vices des hommes et à se mettre, en quelque sorte, indignement au service de leurs passions pour que, grâce à leur aide, ils pussent s'adonner davantage à leurs voluptés. Et, pour ne pas avoir l'air de s'être abaissés spontanément à un ministère indigne d'eux, ils apprirent aux hommes que les démons, moyennant certains artifices, à savoir des invocations magiques, pouvaient obéir aux mortels. Ainsi, après avoir soustrait la lumière de la piété, ils remplirent le monde entier d'une fumée d'impiété, comme extraite d'une fournaise et d'un atelier du mal. Pour ces raisons, et quelques autres encore, le déluge fut envoyé sur le monde, comme nous l'avons déjà dit dans un autre contexte et comme nous le répéterons.

Stratagèmes de Zoroastre

26        1 « Et tous ceux qui vivaient sur la terre furent anéantis, excepté la famille de Noé, qui survécut avec ses trois fils et leurs épouses. 2 L'un d'eux, du nom de Cham, découvrit par malheur l'art de la magie et en transmit la connaissance à l'un de ses fils, appelé Mestraim, de qui descend la race des Egyptiens, celle des Babyloniens et celle des Perses. 3 Les nations qui vivaient à cette époque l'ont appelé Zoroastre, admirant en lui l'inventeur de l'art magique ; sous son nom existent également de très nombreux livres sur ce sujet. 4 Cet homme donc, s'adonnant longuement et fréquemment à l'étude des astres, et voulant passer pour un dieu auprès des humains, fit comme si, des étoiles, il tirait des sortes d'étincelles qu'il se mit à faire briller aux yeux des hommes pour plonger dans la stupeur par ce prodige les naïfs et les ignorants ; 5 et désirant accroître l'opinion qu'il était un dieu, il répétait sans cesse ce manège/jusqu'au moment où il prit feu et fut consumé par le démon lui-même, qu'il importunait de ses sollicitations excessives.

Zoroastre vénéré après sa mort comme un dieu

28 x « Mais les hommes de ce temps, dans leur stupidité, au lieu de rejeter l'opinion qu'ils s'étaient faite de lui, comme ils l'auraient dû de toute façon en la voyant contredite par la mort qui lui avait servi de châtiment, en conçoivent une opinion plus haute encore. 2 En effet, après avoir élevé un tombeau en son honneur, ils eurent l'audace de l'adorer en tant qu'ami de Dieu, enlevé au ciel sur un char de foudre, et de lui adresser un culte comme à un astre vivant. 3 C'est de là en effet, après sa mort, que le nom de Zoroastre, c'est-à-dire "astre vivant", lui fut donné par ceux qui, une génération plus tard, s'étaient imprégnés de la langue grecque. 4 Finalement, c'est en suivant cet exemple que beaucoup d'hommes, aujourd'hui encore, vénèrent ceux qui ont péri par la foudre en leur élevant des tombeaux pour les honorer comme amis de Dieu. 5 Ce personnage, étant donc né dans la quatorzième génération, mourut dans la quinzième, celle où fut édifiée la tour et où les langues des hommes furent divisées de multiple manière.

Origine du culte du feu

29 x « Néanmoins le premier d'entre eux reçoit l'art de la magie comme si un éclair était descendu jusqu'à lui. Il s'agit d'un certain roi nommé Nebroth, que les Grecs ont aussi appelé Ninus, de qui la ville de Ninive a pris son nom. Ainsi donc, des superstitions diverses et fallacieuses trouvèrent leur point de départ dans l'art magique : 2 car, étant donné qu'il était difficile de détourner l'espèce humaine de l'amour de Dieu et de l'attirer vers des statues sourdes et sans vie, les magiciens recoururent à des manœuvres de plus haut niveau afin d'amener les hommes, grâce aux constellations et aux mouvements des astres qui semblaient venus du ciel et dictés par la volonté de Dieu, à répandre des cultes mensongers. 3 Et les hommes qui avaient été trompés les premiers récoltèrent les cendres de celui qui avait été, comme nous l'avons dit plus haut, brûlé par le démon, irrité de ce qu'il l'avait trop importuné ; comme si c'étaient les restes du feu de la foudre, ils les apportent aux Perses pour que soit conservé par eux sous garde perpétuelle ce qui passait pour un feu divin, tombé du ciel, et pour qu'il soit l'objet d'un culte comme un dieu céleste.

Progrès de l'erreur

30 1 « Imitant cet exemple, ailleurs aussi les autres hommes voulurent construire des temples à ceux qu'ils avaient admirés dans l'exercice de quelque art ou dans celui de la vertu, ou pour qui du moins ils avaient éprouvé une très grande affection ; ils eurent à cœur de leur élever des statues, d'instaurer pour eux des mystères , des cérémonies et des sacrifices et, par tous les moyens, de transmettre à la postérité l'opinion qu'ils étaient des dieux ; 2 ils étaient portés à ces initiatives surtout par le fait que, comme nous l'avons dit plus haut, elles semblaient étayées par certains prestiges de l'art magique, si bien qu'ils paraissaient réaliser des opérations et des mouvements grâce à l'invocation des démons, pour tromper les hommes. 3 Ils y ajoutent encore des festivités et des beuveries : les hommes d'une part y trouvaient leur plus grand plaisir, et les démons d'autre part, profitant de l'ivresse comme d'un véhicule pour s'introduire en eux, allaient se mêler à leurs entrailles elles-mêmes, où ils établissaient leur siège pour infléchir de là, au gré de chacune de leurs volontés, les actes et les pensées des hommes. 4 De telles aberrations s'étant donc introduites dès l'origine, favorisées en outre par le dérèglement et l'ivrognerie auxquels les hommes charnels se complaisent extrêmement, la religion de Dieu, qui reposait sur la continence et la sobriété, commença à devenir rare parmi les hommes, et peu s'en fallut qu'elle ne disparût.